Il pleut à Ideles
Il pleut sur l'Ahaggar. Depuis deux ou trois ans, il se remet à pleuvoir en été sur cette région du monde. Des pluies parfois violentes, des pluies d'été, comme j'ai connu dans mon enfance, rien d'extraordinaire quand on y est préparé. On nous parle de réchauffement climatique et de tout ce que cela engendre. Je veux bien mais parlons en juste un peu. Quand j'étais petit, on nous apprenait des choses simples et utiles, observer le ciel, les nuages, la pluie, comment se comporter lors du passage d'une crue etc. Des petites choses que les enfants d'aujourd'hui n'apprennent pas forcément, sauf dans les campements, car leurs vies peuvent en dépendre. Ce sont des acquis pour toujours, cela peut servir bien plus tard et ailleurs. Lors d'un de mes voyages sahariens, nous avions décidé mes chauffeurs et moi même de ne pas passer la nuit dans le lit de l'oued, sur un beau sable blanc, le ciel ne nous plaisait pas, plutôt menaçant, nous montions notre camps sur la berge et nous avions raison, la crue est arrivée dans la nuit, sans qu'une goutte de pluie ne soit tombée sur nous, il a bien plu en amont. Dans le temps, les villages étaient construits en argile et les toits étaient aussi recouverts d'une couche d'argile. Une fois par an, juste avant l'été, les villageois mettaient une couche supplémentaire aux murs des maisons, sachant que les pluies vont en grignoter quelques centimètres. C'était des travaux collectifs, une entraide était organisée, chaque jour, on refaisait les murs d'une autre famille, qui aura au préalable fait le stock suffisant d'argile et d'eau, le repas de tous étaient aussi donné par la dite famille. Dans ces localités d'antan, des huttes en typha étaient aussi construites, pour supporter les grosses chaleurs d'été et surtout, lors de grosses pluies, les gens préféraient l'abri des huttes à celui des constructions en argile. Le réchauffement climatique s'est fait ressentir plutôt en hiver, nous avions des températures bien en dessous de 0. L'eau était très souvent gelée. A Ideles, le thermomètre descendait jusqu'à moins six et c'était normal a Tazrouk on a mesuré des moins 12 degrés, à l'Assekrem, le givre et la neige venaient décorer le paysage sous des températures allant jusqu'à moins 20 degrés. Oui, tout cela n'est plus qu'histoire. Il ne fait plus suffisamment froid, je me suis laissé dire que le gel qui régulait l'agriculture en tuant toutes les larves d'insectes n'étant plus là on observe des récoltes complètement détruites par des vers qui naissent dans la fleur en attendant le fruit. Donc de quoi parle t'on au juste, réchauffement ou destruction climatique ? Qui en est le fautif ? Qui en subi les conséquences ? Autant de questions qui resteront sans réponses. Une petite anecdote, une nuit pluvieuse au refuge de l'Assekrem, au petit matin, des touristes européens se plaignaient d'avoir été dérangés dans leur sommeil par quelques gouttes qui seraient passées à travers la vieille toiture. Le gardien des lieux, visiblement fatigué d'avoir passé la nuit à colmater les fuites, fatigué mais heureux, prend acte des plaintes, se retourne vers moi et me dit "ils ont quoi ces gens là ? Dieu nous envoi sa bénédiction et ils ne sont pas contents !!! " Au Sahara, il faut être très prudent quand il pleut. Beaucoup y ont perdu leur vie, emportés par les eaux, ou retrouvés noyés dans des gueltas. L'eau est source de vie mais .........!